22.03.2022

Circulaire 16/2022 – Droit de la concurrence de l’UE – Consultation sur le projet de lignes directrices horizontales révisées – Merci pour vos commentaires d’ici le 12 avril 2022 18h

Alexis - Alexis.Waravka@IndependentRetailEurope.eu - +32 2 739 60 92

La Commission européenne organise jusqu’au 26 avril 2022 une consultation sur son projet de lignes directrices révisées relatives aux accords de coopération horizontale dans le cadre du droit européen de la concurrence (lignes directrices horizontales ou HGL). Celles-ci revêtent une grande importance pour les groupements de détaillants indépendants, puisqu’elles réglementent une bonne partie de leur coopération interne (comme les échanges d’informations, la commercialisation ou les achats communs, etc.) et externe (les alliances du commerce de détail, par exemple). Afin de préparer une réponse à cette consultation, nous invitons nos membres à nous faire parvenir leurs commentaires pour le mardi 12 avril 2022 en fin de journée.

 

Contenu du projet de lignes directrices horizontales révisées

À la suite des différentes consultations organisées ces deux dernières années (et auxquelles Independent Retail Europe a répondu), la Commission européenne a publié le 1er mars 2022 son projet de lignes directrices horizontales révisées (HGL), sur lequel les parties prenantes peuvent faire part de leurs commentaires jusqu’au 26 avril 2022.

Le projet de HGL révisées propose d’amender les lignes directrices existantes en les adaptant à la numérisation de l’économie et à la nécessité de poursuivre des objectifs de durabilité, dans le droit fil du pacte vert européen, tout en tenant également compte de l’importante jurisprudence des dix dernières années.

Il contient à cette fin d’importantes modifications au niveau de l’introduction des HGL, ainsi que dans les chapitres sur les achats communs, la commercialisation et l’échange d’informations. Il inclut également un nouveau chapitre sur les accords de durabilité.

  1. Nouveautés dans l’introduction des HGL

L’introduction a fait l’objet d’une restructuration pour fournir plus de détails sur certains aspects clés pertinents pour l’ensemble des HGL. Elle contient une nouvelle orientation sur les aspects suivants :

a) Comment évaluer le centre de gravité d’accords englobant différents types de coopération (§ 6-8)

Dans de tels cas, même si tous les éléments des HGL sont pertinents, le volet qui couvre le centre de gravité de la coopération prévaut pour déterminer si l’accord crée des restrictions de la concurrence par objet ou par effet. Le centre de gravité est évalué au moyen du « point de départ » de la coopération et du degré d’intégration des différentes fonctions.

Ainsi, un accord combinant spécialisation et commercialisation sera considéré comme un accord de spécialisation, puisque la commercialisation ne peut pas avoir lieu sans le premier composant.

b) Définition des entreprises (§ 11-14) et des concurrents (§ 17)

Une référence à la jurisprudence récente est ajoutée sur la façon de définir la notion des entreprises, dans le cas de sociétés mères et de leurs entreprises communes. Le projet de HGL propose en outre une orientation supplémentaire pour déterminer si deux entreprises sont des « concurrents potentiels ».

  1. Changements dans l’orientation sur les achats communs (chapitre IV)

a) Types d’accords d’achats communs (§ 312)

L’orientation clarifie qu’il existe plusieurs types d’accords d’achats communs : la mise en commun d’achats réels et les négociations communes (de prix, de certains éléments de prix ou d’autres conditions générales – tout en laissant les achats proprement dits à chaque membre) sont toutes deux considérées comme des accords d’achats communs relevant de ce chapitre.

Les alliances du commerce de détail sont explicitement reconnues comme une forme d’achats communs, avec une référence directe au rapport du JRC sur les alliances du commerce de détail dans la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire.

Commentaire : ceci apparaît comme un ajout positif aux HGL. Independent Retail Europe a demandé une reconnaissance explicite du fait que les alliances du commerce de détail constituent des accords d’achats communs, dans toute leur diversité.

b) Avantages des achats communs (§ 313)

Parmi les nouveautés, citons la référence au fait que les achats communs visent « généralement » à créer un pouvoir d’achat face à de « grands » fournisseurs.

Autre ajout : l’explication que les achats communs peuvent déboucher sur une plus grande variété de produits (en complément de la meilleure qualité et des prix inférieurs déjà évoqués dans les lignes directrices existantes). Les achats communs peuvent en outre permettre aux entreprises d’éviter des pénuries / perturbations de la production de certains biens.

Commentaire : ces nouveautés semblent positives, puisque l’on trouve des références à de nouveaux gains d’efficacité générés par les achats communs.

c) Clarification de l’orientation sur les restrictions « par objet » et distinction entre les cartels d’acheteurs et les accords d’achats communs (§ 316-319)

Les paragraphes 316-318 incluent une (nouvelle) clarification sur la différence entre les cartels d’acheteurs et les achats communs, tandis que le paragraphe 319 propose une liste non exhaustive des facteurs permettant d’évaluer cette distinction en pratique.

Pour résumer, les cartels d’acheteurs constituent des restrictions par objet visant à :

  • « coordonner le comportement concurrentiel individuel de ces acheteurs sur le marché ou à influencer les paramètres de la concurrence par des pratiques consistant notamment, mais pas uniquement, à fixer ou à coordonner des prix d’achat ou des éléments de ceux-ci (y compris des accords de fixation des salaires ou de refus de paiement d’un prix pour un produit) ou d’autres conditions de transaction, à attribuer des quotas de vente, à répartir des marchés et des clients» ; et
  • « influencer les négociations individuelles de ces acheteurs avec les fournisseurs ou leurs achats individuels auprès de ces derniers, par exemple en coordonnant les stratégies de négociation de prix des acheteurs ou en échangeant sur l’état de ces négociations avec les fournisseurs».

Les paragraphes 317 et 318 indiquent que :

  • dans le cadre d’un cartel, les acheteurs coordonnent leurs interactions individuelles avec les fournisseurs ;
  • s’ils traitent individuellement avec les fournisseurs, les acheteurs devraient prendre leurs propres décisions d’achat indépendamment, sans éliminer l’incertitude planant entre eux quant à leur futur comportement sur le marché ;
  • les pratiques consistant à fixer d’abord un prix d’achat parmi les participants, puis à laisser chaque acheteur négocier / acheter individuellement par la suite sont susceptibles d’être considérées comme un cartel ;
  • on peut être en présence d’un cartel si les acheteurs échangent des informations commercialement sensibles à propos de leurs intentions / négociations d’achat individuelles avec les fournisseurs (par exemple prix d’achat, conditions générales, sources d’approvisionnement, volumes, quantités, qualité, calendrier, livraison et innovation), en dehors de tout véritable accord d’achat commun interagissant de façon collective avec les fournisseurs au nom de ses membres.

Le paragraphe 319 présente deux ensembles de critères (non exhaustifs) pour aider à évaluer les accords d’achats communs qui ne sont pas des cartels d’acheteurs :

  • L’acheteur commun n’a pas caché aux fournisseurs qu’il s’adonne à des négociations communes et lie ses membres au niveau des conditions générales de leurs achats individuels ou qu’il procède aux achats communs pour eux. Cela n’exige toutefois pas de divulguer l’identité des membres, surtout s’il s’agit de PME. Une connaissance indirecte de cette condition par les fournisseurs n’est pas suffisante.
  • Les parties à un accord d’achat commun disposent d’un accord écrit définissant la forme de leur coopération, son champ d’application et son fonctionnement (pour permettre de vérifier la conformité ex post de l’opération réelle) – bien qu’un accord écrit ne puisse pas, en soi, les protéger du droit de la concurrence.

Commentaire : de nombreuses autorités nationales de concurrence ont réclamé ces clarifications, qui ne semblent pas soulever de préoccupations particulières, puisqu’elles sont censées refléter la jurisprudence existante. Êtes-vous d’accord ? Les critères figurant au paragraphe 319 suscitent-ils la moindre difficulté pratique pour les alliances du commerce de détail ?

d) Orientation actualisée sur les restrictions « par effet »

Le paragraphe 325 actualise l’orientation générale à propos des restrictions par effet sur la base de la jurisprudence, indiquant que certaines dispositions contractuelles ne relèvent pas de l’article 101, paragraphe 1, du TFUE si elles s’avèrent objectivement nécessaires pour l’accord d’achat commun. Citons en exemple une interdiction pour les parties à l’accord d’achat commun de participer à un accord concurrentiel si cela peut mettre en péril les opérations et le pouvoir d’achat de l’accord d’achat commun. Des obligations d’achat exclusives (contraignant par exemple les membres à satisfaire l’ensemble / la majorité de leurs besoins d’achat par le biais de cet accord) peuvent toutefois avoir des effets anticoncurrentiels nécessitant une évaluation spécifique.

e) Effet du pouvoir de marché

Le projet de HGL révisées a introduit deux nouveaux paragraphes (331 et 332) sur l’impact potentiel du pouvoir de marché des acheteurs sur les fournisseurs situés en amont.

Il y a un risque que les achats communs puissent porter préjudice à la concurrence en amont si les parties disposent d’un pouvoir d’achat important sur le marché d’achat (§ 331), en nuisant par exemple aux incitations à l’investissement ou en contraignant les fournisseurs à réduire leur gamme de produits ou leur qualité. Plus précisément :

  • les risques sont plus élevés pour les gros acheteurs (qui représentent conjointement une proportion plus importante des achats) en particulier dans le cadre d’interactions avec des petits fournisseurs (§ 332) ;
  • le préjudice est moins susceptible de se produire si les fournisseurs disposent d’un important pouvoir de vente compensateur (n’équivalant pas nécessairement avec une position dominante) sur le marché d’achat (par exemple, lorsqu’ils vendent des produits indispensables).

Le (nouveau) paragraphe 333 clarifie en outre qu’un boycott de produits non durables dans le cadre d’un accord d’achat commun ne devrait pas être considéré comme une restriction « par objet ». Les restrictions « par effet » doivent toutefois faire l’objet d’une évaluation sur la base de la nature des produits et de la position de marché des acheteurs et des fournisseurs (par exemple s’ils ont d’autres clients / peuvent facilement commencer à fabriquer des produits durables).

Qui plus est, le (nouveau) paragraphe 334 reformule l’ancien paragraphe 201 (des HGL existantes) sur l’effet d’éviction potentiel des achats communs pour les acheteurs concurrents, par exemple en présence d’un nombre limité de fournisseurs et d’obstacles à l’entrée du côté de l’offre en amont. Le paragraphe 334 clarifie également que l’achat commun ayant pour objectif l’exclusion de concurrents réels ou potentiels du marché de vente constitue une restriction de la concurrence par objet.

Le paragraphe 337 modifie légèrement le paragraphe 212 des HGL existantes, soulignant que si les parties à un accord d’achat commun ne sont pas actives sur le marché de vente, cet accord est moins susceptible d’avoir des effets restrictifs, en insistant sur le fait que des effets restrictifs peuvent toujours survenir en amont si le pouvoir d’achat est tel qu’il nuit au processus concurrentiel des autres acteurs (non parties à l’accord).

Commentaires :

  • Comme prévu (et annoncé par la Commission et dans le rapport du JRC sur les alliances du commerce de détail), cette partie du projet de HGL décrit plus en détail les dommages potentiels par effet en amont.
  • Parmi les éléments positifs, citons le fait que l’orientation mentionne que les effets restrictifs sont moins probables lorsque les fournisseurs disposent d’un important pouvoir compensateur, ainsi que la référence aux produits incontournables dans ce contexte.
  • Pensez-vous que certaines dispositions des paragraphes 331-332 nécessitent une clarification ? Par exemple, la notion de petit fournisseur ? Ces nouveaux paragraphes 331 et 332 risquent-ils de créer des complications pour les alliances « nationales » ou pour les groupements de détaillants indépendants s’adonnant à des achats communs auprès de petits fournisseurs nationaux ?

f) Résultat collusoire – Arrêt des commandes / déréférencement des produits

Le paragraphe 343 reconnaît explicitement que les menaces d’arrêt des commandes ou de déréférencement (temporaire) « s’inscrivent généralement dans le cadre d’un processus de négociation et peuvent impliquer des actions collectives de la part des acheteurs », tout en admettant que les fournisseurs puissent avoir recours à la même technique lors d’une négociation.

De telles menaces / actions ne constituent généralement pas une restriction de la concurrence par objet et leurs éventuels effets restrictifs ne doivent pas être évalués séparément, mais bien à la lumière de l’incidence globale de l’accord d’achat commun.

Commentaire : cette reconnaissance semble positive. Êtes-vous d’accord ?

g) Répercussion des prix inférieurs sur les consommateurs

Le paragraphe 347 confirme que les entreprises ayant conclu un accord d’achat commun se voient incitées à répercuter au moins une partie de la réduction des coûts variables en résultant (plus la marge bénéficiaire découlant de la réduction des coûts variables est importante et plus élevée sera l’incitation commerciale à la répercuter). Ce paragraphe prévoit toutefois deux exceptions à cet avantage général :

  • lorsque les membres disposent d’un pouvoir important sur le marché de vente (cette idée figurait déjà dans le paragraphe 219 des HGL existantes) ;
  • dans les cas de réduction pure des coûts fixes (par exemple des sommes forfaitaires versées par les fournisseurs), puisque cela n’incite pas à développer la production.

Ce paragraphe doit être lu conjointement avec le paragraphe 335 (sur l’effet du pouvoir de marché), qui confirme l’idée que si les membres de l’accord d’achat commun détiennent un pouvoir significatif sur le marché de vente, ils seront moins enclins à répercuter les réductions de coûts sur les consommateurs. Le risque est particulièrement élevé si l’accord limite ou décourage la capacité d’acheter indépendamment des volumes supplémentaires sur le marché d’achat (par le biais de l’accord ou en dehors de celui-ci). Si l’accord contient une obligation de satisfaire la totalité ou la majeure partie de leurs besoins d’achat par le biais de l’achat commun, une évaluation spécifique des effets restrictifs éventuels est requise.

Commentaire : que pensez-vous des paragraphes 335 et 347 ? La deuxième exception mentionnée au paragraphe 347 (sommes forfaitaires) pose-t-elle problème ? Le cas échéant, pouvez-vous présenter un contre-argument ?

h) Nouvel exemple d’achats communs et d’alliances européennes du commerce de détail

Le paragraphe 350 propose un nouvel exemple d’achats communs sous la forme d’une alliance européenne du commerce de détail (ERA).

L’exemple inclut sept détaillants de différents États membres qui négocient en commun des conditions supplémentaires avec un important fabricant de marques (à savoir une remise supplémentaire en échange de certains services promotionnels couvrant les sept pays où les détaillants vendent) pour leur futur accord d’approvisionnement. L’ERA dispose d’une part de marché ne dépassant pas les 18 % sur chaque marché d’achat concerné, et chacun de ses membres dispose d’une part de marché estimée entre 15 et 20 % sur leur marché national du commerce de détail. Les négociations incluent des techniques sans concession, notamment une décision d’interrompre temporairement la commande de certains produits (chaque membre décidant précisément quels produits il cesse de commander).

Cet exemple est susceptible de satisfaire aux conditions de l’article 101, paragraphe 1, même si cette alliance ne négocie que certaines conditions parce que les membres ne sont pas actifs sur les mêmes marchés de vente. Le déréférencement temporaire ne nuira pas aux consommateurs, dans la mesure où ces derniers peuvent acheter des produits équivalents auprès de détaillants concurrents et bénéficieront à long terme de prix inférieurs.

  1. Changements pertinents dans le chapitre sur la commercialisation

a) Les groupements de détaillants indépendants et une politique tarifaire commune en ligne

Le chapitre sur la commercialisation présente de légères modifications des lignes directrices existantes qui peuvent s’avérer utiles pour les groupements de détaillants indépendants désireux de mettre en place une plateforme de vente en ligne avec une politique tarifaire commune.

S’appuyant sur le paragraphe 246 des lignes directrices existantes, le paragraphe 380 du projet de lignes directrices révisées mentionne désormais explicitement que la distribution commune permet de générer des gains d’efficacité importants, « particulièrement pour les groupements de détaillants indépendants, par exemple lorsqu’ils tirent parti de nouvelles plateformes de distribution pour rivaliser avec des opérateurs mondiaux ou d’envergure ».

En outre, pour soutenir cette reconnaissance explicite, le projet de HGL revisées modifie l’exemple précédent de plateforme commune avec un prix fixe (voir le paragraphe 400 basé sur le paragraphe 254 des lignes directrices existantes) en reconnaissant explicitement que la fixation de prix dans cet exemple génère des gains d’efficacité résultant de l’image de marque commune en ligne.

Commentaires :

  • Il s’agit là de modifications très positives introduites dans le projet de HGL révisées, puisqu’elles peuvent aider les groupements de détaillants indépendants à mettre en place une plateforme commune avec des prix fixes à certaines conditions, surtout lorsque leur part de marché est inférieure à 15 % (l’idée étant que les avantages sont répercutés sur les consommateurs). La Direction générale de la concurrence nous a expliqué que ce changement est destiné à appuyer notre demande, sans modifier l’approche fondamentale du droit de la concurrence en matière de fixation des prix.
  • Nous proposons de modifier légèrement l’exemple figurant au paragraphe 400, pour veiller à ce qu’il couvre les cas de Click & Collect, avec les consommateurs choisissant le magasin. Êtes-vous d’accord ?
  • Avez-vous la moindre suggestion de nouvelle amélioration de cet exemple (sans modification radicale des HGL concernant la fixation des prix, compte tenu de la nature horizontale de ces lignes directrices) ?

b) Autres changements

Le projet de HGL révisées contient d’autres changements à propos d’aspects sur lesquels nous n’avons pas pris position jusqu’à présent :

  • des règles spécifiques pour les accords de commercialisation de produits agricoles (§ 359) ;
  • une orientation supplémentaire sur les principaux risques de limitation de la production dans les accords de commercialisation (§ 364 et 367) ;
  • de nouvelles clarifications sur les marchés affectés et sur les effets anticoncurrentiels (chapitre 5.2.3) ;
  • une section spécifique sur les consortiums d’appels d’offres (chapitre 5.4) et, en particulier, sur l’évaluation d’accords de consortium conclus entre des parties qui seraient en mesure de participer individuellement aux appels d’offres, et sur l’analyse à réaliser dans de tels cas.

Commentaire : puisque nous n’avons pour l’heure pris position sur aucun de ces aspects, n’hésitez pas à nous faire signe si certains d’entre eux soulèvent des préoccupations particulières.

  1. Échanges d’informations (chapitre 6)

a) Aspects généraux

L’introduction de ce chapitre propose au paragraphe 407 une définition des informations (par exemple les données brutes, les données prétraitées, les données manipulées pour produire des informations significatives et tout autre type d’information).

Le paragraphe 411 clarifie également le cas des échanges d’informations résultant d’obligations juridiques, indiquant que l’article 101, paragraphe 1, s’applique pleinement à ces types d’échanges. Les entreprises contraintes de partager des informations doivent alors restreindre celles-ci au strict minimum et peuvent avoir à mettre en place des mesures de précaution. Un exemple est fourni.

b) Le cas des algorithmes

Le paragraphe 418 (qui fait partie de l’orientation sur les résultats collusoires dans les échanges d’informations) évoque le cas des algorithmes. La « collusion par le code » désigne l’application délibérée par les concurrents d’algorithmes communs de coordination comportementale et constitue dès lors une restriction de la concurrence par objet.

Il convient de la distinguer de la « collusion algorithmique », dans le cadre de laquelle l’utilisation d’algorithmes par des concurrents peut augmenter le risque d’un résultat collusoire sur le marché (en raison d’une transparence accrue du marché, qui permet de détecter en temps réel les écarts de prix et d’agir en conséquence pour « punir » en pratique les entreprises à l’origine de cet écart). Pour être possible, la collusion algorithmique nécessite une conception spécifique des algorithmes, ainsi que des conditions de marché bien précises (fréquence d’interactions élevée, pouvoir d’achat limité et produits homogènes).

Le paragraphe 432 précise également que la divulgation unilatérale d’informations pouvant donner lieu à des violations de l’article 101, paragraphe 1, concerne également « l’entrée dans un outil algorithmique partagé » (dès lors indirectement).

Enfin, le paragraphe 436 fournit également un exemple d’échange d’information indirect par le biais d’un algorithme d’optimisation partagé (qui prendrait des décisions commerciales sur la base de flux de données commercialement sensibles ou de la mise en œuvre dans des outils automatisés de mécanismes alignés / coordonnés d’optimisation) entre concurrents. Dans un tel contexte, si l’utilisation de données publiquement disponibles est légale pour alimenter le logiciel, l’agrégation de données sensibles dans un outil de tarification fourni par une unique entreprise informatique et auquel différents concurrents ont accès pourrait constituer une collusion. Ce dernier exemple pourrait être particulièrement pertinent dans un groupement de détaillants indépendants.

Commentaire : les dispositions sur la « collusion algorithmique » vous semblent-elles suffisamment claires ? Où sont-elles si générales qu’elles pourraient se prêter à des cas très généraux d’utilisation d’algorithme dans le commerce de détail (en ligne) ? Devrions-nous demander l’ajout de critères supplémentaires ? (Si oui, lesquels ?) Avez-vous un autre commentaire concernant les dispositions sur les algorithmes ?

c) Exemples d’informations commercialement sensibles

Le paragraphe 424 fournit une liste d’informations jugées particulièrement sensibles sur un plan commercial et dont l’échange constitue une restriction par objet :

  • prix et intention de prix ;
  • capacités de production actuelles et futures ;
  • stratégie commerciale prévue ;
  • dispositions prises pour répondre à la demande actuelle et future ;
  • futures ventes ;
  • état actuel et stratégie commerciale ;
  • futures caractéristiques de produits pertinentes pour les consommateurs ;
  • positions sur le marché et stratégies aux enchères pour des produits financiers.

Commentaire : cela semble constituer une clarification positive.

d) Ancienneté des données

Le paragraphe 431 fournit un élément supplémentaire sur la façon de déterminer si des données sont suffisamment anciennes pour ne pas être considérées comme sensibles, soulignant la nécessité d’une évaluation au cas par cas en fonction du marché spécifique. Il propose un exemple dans lequel les informations de maximum un an ne sont pas considérées comme « historiques », mais sensibles (par exemple dans les secteurs dépendant des préférences des consommateurs pour optimiser les décisions stratégiques des enseignes).

e) Mesures de limitation / contrôle de la façon dont les données sont utilisées et accessibles

Les paragraphes 440 à 442 offrent une orientation sur des mesures destinées à contrôler l’accès aux données.

Le paragraphe 440 en particulier propose une orientation sur :

  • la mise en place d’« équipes propres » (à savoir un groupe restreint d’individus non impliqués dans les opérations commerciales quotidiennes et liés par de stricts protocoles de confidentialité par rapport aux informations commercialement sensibles) ;
  • les banques de données, dans lesquelles les participants peuvent accéder à leurs propres informations et aux informations agrégées finales d’autres participants. Des mesures sont alors prises pour veiller à ce qu’un participant ne puisse pas obtenir d’informations commercialement sensibles d’autres participants, tout en donnant uniquement accès aux informations nécessaires à la mise en œuvre de la finalité légitime de la banque de données en question. La gestion de la banque de données peut être confiée à un tiers avec des règles de confidentialité strictes (ce paragraphe est très important pour les groupements de détaillants indépendants).

Enfin, le paragraphe 441 prévoit que lorsque l’échange d’informations est stratégique pour la concurrence et couvre une part importante du marché concerné, mais ne présente pas un risque de résultat collusoire, de tels échanges d’informations peuvent uniquement être autorisés si les données sont accessibles de façon non discriminatoire par toutes les entreprises actives sur le marché concerné (car autrement, il y a un risque d’éviction).

Commentaire : Independent Retail Europe demandait une orientation plus détaillée sur le partage de données, puisque cela pourrait faciliter de tels échanges d’informations au sein des groupements de détaillants indépendants. L’inclusion de cette nouvelle orientation détaillée est dès lors positive. Avez-vous des commentaires ou une demande de clarification sur les possibilités d’échanges d’informations au moyen d’équipes propres et de banques de données dans le contexte d’un groupement de détaillants indépendants ?

  1. Accords de durabilité (chapitre 9)

Le projet de HGL révisées contient un nouveau chapitre sur les accords entre concurrents poursuivant un objectif de durabilité (la définition de la durabilité utilisée au paragraphe 543 reflète la vision de l’UE en la matière), et sur la façon dont de tels accords seront évalués. L’orientation reconnaît que l’application du droit de la concurrence contribue au développement durable (§ 544). Elle constate toutefois que des accords de durabilité entre concurrents permettent d’atténuer des défaillances du marché qui n’ont pas été abordées par la législation (§ 546).

a) Accords de durabilité ne soulevant pas de préoccupations de concurrence (§ 551-554)

Les accords suivants ne soulèvent pas de préoccupations de concurrence :

  • accords n’affectant pas les paramètres de concurrence (par exemple, quantité avérée, qualité, choix, innovation) ;
  • accords ne concernant pas l’activité économique des concurrents, mais leur conduite interne d’entreprise (comme un accord sur des mesures pour éliminer les plastiques à usage unique de leurs bâtiments, etc.) ;
  • accords créant des bases de données d’informations sur des fournisseurs ou distributeurs soucieux de la durabilité n’exigeant pas des parties d’acheter / de vendre à ces fournisseurs / distributeurs ;
  • accords d’organisation de campagnes de sensibilisation pour les consommateurs (n’équivalant pas à une publicité commune d’un produit).

b) Principe général – classification du type d’accord

Le paragraphe 556 précise que lorsqu’un accord de durabilité prend la forme d’un type de coopération spécifique couvert par une section bien précise des HGL (par exemple les achats communs, la commercialisation, etc.), il devrait être évalué dans le cadre de l’orientation pour ce type d’accord. La durabilité sera prise en compte pour déterminer toute éventuelle restriction par objet ou par effet (§ 560). Lorsque de tels accords poursuivent des restrictions par objet spécifiques, leurs parties devront en outre démontrer que l’objectif est vraiment d’atteindre la durabilité, et pas de masquer un objectif anticoncurrentiel (§ 560).

c) Accords de normalisation de la durabilité (chapitre 9.3.2)

Dans le cadre de tels accords, les concurrents conviennent d’adopter certaines normes de durabilité et de s’y conformer (voir les paragraphes 561 à 567). Bien qu’ils puissent offrir des avantages aux consommateurs, si ces accords portent sur des questions liées à la façon de traduire l’augmentation des coûts résultant de l’adoption de la norme en une augmentation des prix de vente, ils restreignent la concurrence par objet (§ 571).

Pour l’évaluation des effets restrictifs sur la concurrence, une « sphère de sécurité souple » est créée (§ 572) si les conditions suivantes sont remplies :

  • un : la procédure d’élaboration des normes est transparente et tous les concurrents intéressés peuvent y participer ;
  • deux : la norme ne devrait pas imposer d’obligation (directe ou indirecte) de conformité aux entreprises qui ne souhaitent pas y participer ;
  • trois : les entreprises participantes devraient rester libres d’adopter par elles-mêmes une norme plus stricte ;
  • quatre : les parties impliquées ne devraient pas échanger d’informations commercialement sensibles qui ne sont pas nécessaires à l’élaboration, à l’adoption ou à la modification de la norme ;
  • cinq : il faudrait garantir un accès effectif et non discriminatoire au résultat de la procédure de normalisation, notamment aux exigences et aux conditions pour l’obtention du label convenu ou pour son adoption à une étape ultérieure ;
  • six : la norme ne devrait pas se traduire par une augmentation significative du prix ni une réduction du choix ;
  • sept : il devrait y avoir un système de surveillance pour garantir la conformité.

Si certaines de ces conditions ne sont pas remplies, une évaluation de l’incidence de l’accord sur la concurrence est nécessaire. Si un effet restrictif est découvert, une exemption peut encore être trouvée sur la base des quatre critères mentionnés dans l’article 101, paragraphe 3, à savoir les gains d’efficacité, l’indispensabilité, la répercussion sur les consommateurs et l’absence de restriction de la concurrence.

En ce qui concerne le critère d’indispensabilité, l’orientation clarifie que :

  • lorsque la législation européenne ou nationale exige la conformité avec des objectifs de durabilité concrets, les accords pour les atteindre ne peuvent pas être considérés comme indispensables (§ 583) ;
  • ce critère est atteint si les parties peuvent prouver que les consommateurs ne peuvent pas objectivement mettre en balance les avantages futurs (par exemple, une meilleure qualité / innovation) en termes de durabilité et le préjudice immédiat qu’ils subissent (comme une augmentation des prix) (§ 586) ;
  • les obligations figurant dans les accords ne devraient pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif de l’accord (§ 587).

En ce qui concerne la « répercussion sur les consommateurs » (§ 588-609), l’orientation en distingue trois types :

  • les avantages de la valeur d’usage individuelle (résultant de l’utilisation du produit). Il peut s’agir d’une amélioration de la qualité ou de la variété des produits ou d’une diminution de prix (§ 590-593) ;
  • les avantages individuels de la valeur de préservation (avantages indirects résultant de l’appréciation par les consommateurs de l’impact de leur consommation durable). Citons par exemple l’utilisation d’un certain type de produit moins dommageable pour l’environnement ou la volonté de payer plus pour un produit récolté de façon durable (§ 594-600) ;
  • les avantages collectifs (en cas de besoin par exemple pour internaliser les externalités négatives, indépendamment des avantages individuels pour les consommateurs). Il peut notamment s’agir d’accords d’élimination progressive de la pollution lorsque les consommateurs ne sont pas disposés à payer un prix plus élevé (§ 601-608). Le paragraphe 606 explique les conditions à remplir pour prendre en compte les avantages collectifs (comme décrire clairement les avantages en attestant qu’ils se sont déjà produits ou sont susceptibles de se produire, définir les bénéficiaires, les consommateurs doivent se recouper avec les bénéficiaires, démontrer quelle part des avantages collectifs en dehors du marché pertinent revient aux consommateurs du produit sur le marché en question). Dans ce contexte, les preuves basées sur les rapports des pouvoirs publics ou préparées par des organisations académiques reconnues sont particulièrement précieuses.

En ce qui concerne les critères de « restriction de la concurrence » : un certain degré de concurrence résiduelle doit persister (§ 610), par le biais d’une concurrence sur un paramètre important de concurrence au moins, comme le prix, la variété ou la qualité (§ 611).

Le projet de HGL révisées présente cinq exemples de tels accords de durabilité dans les paragraphes 617 à 621 (certains satisfaisant aux conditions de l’article 101, paragraphe 3, et d’autres pas).

Commentaire : avez-vous des commentaires ou suggestions spécifiques à propos des accords de durabilité ?

 

Réponse à la consultation – retours attendus jusqu’au 12 avril 2022 en fin de journée

Afin de préparer une réponse constructive à la consultation, nous invitons nos membres à nous faire parvenir leurs commentaires sur le projet de HGL révisées, et en particulier sur les questions posées tout au long de cette circulaire pour le 12 avril 2022 en fin de journée.